Horror Stories

Elle était mon monde


Elle était belle ma dulcinée. Tendre, et si pleine d'humour.


Je me souviens des soirées au canapé. Emmitouflés dans notre plaid, une tasse de café sur la table basse, nous regardions nos pages Facebook d'humour noir. Je me souviens de son rire si pur, si spontané. Ses dents de travers, son petit défaut mignon. Je me souviens des parties de chatouille, des parties de "toi t'es", ce petit jeu où on se dit à tour de rôle "toi t'es...untel " en prenant le nom d'une personnalité, de plus en plus nulle. Quand on veut pas être untel on a perdu. Je perdais souvent, j'étais toujours Bouder.


Elle était blonde, ma douce, frisée et si coquette.


J'ai toujours en mémoire la coiffeuse de la chambre, avec ses petits produits. Ses armes. Elle appelait ses instants maquillage son ravalement de façade. Elle n'en avait tellement pas besoin. Sa coiffure préférée, c'était les tresses. Deux tresses droites, de chaque côté de la tête. Elle disait qu'ainsi on ne verrait pas ses frisottis. On voyait ses oreilles d'elfe. Légèrement pointues, qu'elle mettait en valeur avec des petites boucles cerise. Ses petites robes à pois, ses mollets, son bassin fait pour porter la vie...


Elle était si gentille ma moitié. Généreuse et si humaine.


Elle ne savait pas dire non. Tout le monde profitait d'elle. Toujours à se soucier de son prochain. Elle en a passé des heures à aider Pierre, Paul et Jacques. Nos voisins. Elle vous aurait donné le pain de sa bouche si vous lui aviez demandé. Elle portait la misère du monde, et le portait sans bruit.


Elle était tellement mais tellement tout.


Elle n'est plus là ma dulcinée. Elle est si froide et si immobile.


J'y ai été un peu fort hier. D'habitude je dose au milligramme près. Hier j'étais trop fatigué. D'une cuillère on est passé à deux. D'une pilule à trois. Cocktail funèbre. Cocktail libérateur.


Elle sent mauvais, ma douce. Si grise et si gonflée.


Elle est morte dans la nuit. Sans bruit, comme d'habitude. Après quinze années de douce soumission, quinze années dans sa cage dorée... Je suis sûr que les médicaments n'étaient plus nécessaires. Mais j'ai continué.


Elle n'est plus belle, ma moitié. Elle est morte, ma tendre captive. Je dois maintenant en retrouver une...