Ma nuit gyrophare
auteur : Driller_killer
dernière modification le 2023-10-09 17:56:20
* trigger warning = message d'avertissement

La table est rouge. Je ne vois pas bien dans l’obscurité et mes yeux sont fermés par le sang. La lampe ne fonctionne plus. Je clique, je clique, mais rien. C’est drôle. Juste le bruit de l’interrupteur. Clic. Clic.
J’ai mal et le silence est maître.
La porte est ouverte. Il fait nuit et il fait bleu. Ma tête tourne, dans tous les sens. Le sol tangue et mes pieds glissent sur quelque chose d’humide. Poisseux. Je me baisse et je touche, et je sens. Du vomi. J’ai vomi. Je ne m’en souviens pas. Est-ce moi d’ailleurs qui ai… je ne sais pas.
La maison est si calme. Plus tôt pourtant, j’ai entendu une tempête faire rage. C’est calme et rouge. Pourquoi les fenêtres sont absentes ? Déchirées de leurs cadres. Elles pendent.
Je ris. Les fenêtres sont bleues. J’entends encore les cris. Oui, la tempête criait.
Les fenêtres sont rouges. Elles oscillent dans les airs et le bois craque à chaque mouvement. Je regarde, je souris, c’est beau. On dirait des bébés sortis de ventres visqueux dont le cordon est encore relié. Elles sont bleues.
La table est rouge, j’ai beau frotter mes yeux, ça part pas. J’ai peur. Peur d’aller voir de près. Peur de toucher le sang bleu. Le sang ? Bleu ? La table est bleue.
J’ai l’impression d’oublier quelque chose. J’ai mal au bras. Je saigne. J’ai un trou dans le bras.
La porte est ouverte. Les bébés fenêtres sont brisés. La maison est calme. Il fait nuit. Il fait rouge et il fait bleu.
J’ai mal à la tête mais je marche. Je tangue comme un bateau dans la mer rouge et bleue, salée de larmes et de pourriture gastrique, mais je marche et je pleure. Mon ventre hurle. Mes mains pleurent par terre. Plic, ploc. Je saigne. J’ai un trou dans l’épaule.
Où est la porte ? Elle n’est pas ouverte. Elle a disparu. Mais elle n’est pas un bébé. Elle ne pend pas. Et les débris par terre me blessent les pieds.
Je suis donc sans chaussures. Qu’est-ce que je fais ici ? Pourquoi j’ai froid ? Pourquoi j’ai mal ?
J’ai un trou dans le ventre.
La table est rouge et le sang pue. Je tourne, je tourne. Je valse bleu. Je valse rouge. Les escaliers sont sales. Mes pieds collent sur la première marche. Je monte, mais ça marche pas. J’ai mal. Ma respiration est saccadée et je ne parviens pas à me souvenir de ce que je vais trouver en haut. Des chambres ? Un bureau ? Qu’est-ce qu’il m’arrive ? J’ai mal, j’ai peur.
Il n’y a rien en haut. Il n’y a pas d’escaliers. J’ai escaladé en hoquetant du vide. Ce n'est pas un escalier. Je suis monté sur un meuble retourné, brisé. Pourquoi ?
La table est rouge. Et dessus, il y a quelqu’un. Allongé et puant la rouille.
Je descends du meuble. Il est bleu. Je vois mieux. Je ne vomis plus. Mais ça tangue encore et j’ai envie de courir. J’ai envie de crier. J’ai envie de rire. Je ris.
La porte est ouverte. La porte est ouverte. La porte est ouverte.
Je ne peux pas sortir. Je ne peux pas sortir. Je ne veux pas faire ça. Dehors, il y a la lumière. La lumière qui fait mal. Mes yeux roulent. C’est rouge partout. Rouge, rouge. Et c’est bleu aussi. Et ça me fait peur, putain ça me fout la trouille. Je ris encore plus. Et je pleure encore plus.
Il y a eu des cris. La fissure dans ma tête. Je me souviens.
Le meuble allongé. Je l’ai poussé. J’ai hurlé dessus et il est tombé. Je l’ai poussé et elle a crié. La femme a hurlé, en dessous, moi, je riais. J’ai couru. Il fallait que je le fasse; Il fallait que je la calme. Elle a vomi. Puis les lumières sont arrivées et les démons, pas les miens, ont crié. La femme est sortie de l’escalier. J'ai jeté un truc. Elle était sur la table et elle criait du bleu. Elle criait à l’aide. Je vomissais. Elle avait mal. Elle se tenait sur le bois bleu. Elle se vidait de rouge.
J’ai lancé le couteau. Il me faisait peur. Il ne me faisait plus rire.
J’ai pissé dans mon froc.
Je me souviens, oui.
J’ai un trou dans la jambe.
La table est bleue Le corps est bleu. Puis ça redevient rouge. J’ai mal aux yeux. Et dehors les démons hurlent. Ils hurlent pour que je sorte. Je ne peux pas. Ils ne comprennent pas.
La table attend. Je suis devant. Le sang est rouge et la femme est morte.
J’ai un trou dans la tête…